Equipage Chambray

(1850 - 1910)

Maître(s) d'équipage Marquis Jacques de Chambray (1850 - 1910)
TerritoiresForêt de La Ferté, Forêt des Andaines, Forêt de Senonches, Forêt de Perche-Trappe, Forêt d'Ecouves, Forêt de Cerisy, Divers
Devise(s)Jamais de carabine.
Fanfare(s)La Chambray
Historique

L’Équipage Chambray était installé au château du même nom, dans l’Eure, à l’ouest d’une ligne fictive reliant Évreux à Dreux. Jacques, marquis de Chambray, son fondateur, fut un veneur de grand talent et un éleveur remarquable. L’équipage du marquis était bâti sur un quadriptyque solide : des chiens performants au profil singulier, des boutons particulièrement investis, un territoire vaste et polymorphe et, donc, un patron atypique et au savoir-faire indéniable.

 

Jacques de Chambray fut orphelin de père à l’âge de dix-huit ans. Il était de constitution fragile et la vie au grand air n’avait que peu d’attrait pour ce jeune châtelain. Son médecin lui conseilla cependant la pratique de la chasse à courre : l’air pur des forêts normandes devait combattre la bronchite chronique qui l’affectait. Chasseur sur ordonnance, le marquis de Chambray devait, depuis lors, laisser-courre trois à quatre fois par semaine, d’octobre à mai, pendant plus de soixante ans.

 

Le marquis était un homme timide, bienveillant et modeste ; en un mot sympathique. « Il est bon, il est juste, il n’est pas fier », avait un jour dit de lui un petit paysan du coin. À l’Équipage Chambray, on pratiquait une vènerie joyeuse. On y sonnait à la moindre occasion. Le maître d’équipage ne reprochait jamais son erreur à un bouton ayant appuyé un change ou donné un mauvais renseignement. Pour autant, pour tous les veneurs locaux, il était « Le Grand Chef ». Il décidait de tout. Ses directives, bien que données sur un ton amical, étaient scrupuleusement appliquées.

 

Mogador, limier de l'Equipage Chambray - Début du XXe siècle - Société de Vènerie

 

Mais cessons-là l’hagiographie et parlons des chiens. Le marquis de Chambray débuta son élevage avec de petits chiens blanc et orange issus d’une race locale. On a dit qu’ils provenaient de la dislocation de la vènerie royale survenue au moment des troubles révolutionnaires de la fin du XVIIIe siècle. Les premiers chiens du marquis chassèrent le lièvre. On passa ensuite au cerf en augmentant la taille des éléments de la meute. Cajolant fut utilisé comme reproducteur. Chien blanc exceptionnel, il avait été acheté pour 150 francs à un garde de la forêt de Conches. Cajolant fut le père de la grande dynastie des chiens Chambray.

 

Ceux-ci étaient d’un type très spécifique. Ils n’avaient aucun poil noir. Leurs caractéristiques oreilles étaient larges et attachées haut. Les membres étaient épais, solides et forts. Ces beaux chiens étaient très sociables et avaient le regard intelligent. À la chasse, ils se laissaient difficilement tromper dans le change grâce à leur très grande finesse de nez. On attaquait avec des rapprocheurs. Un premier relai était donné à la sortie de l’enceinte. L’ensemble de la meute ralliait ensuite la tête par petits lots. On découplait peu de chiens. Le rythme des chasses était lent mais soutenu. Puisqu’on n’arrêtait jamais la tête, les abois avait souvent lieu dans des endroits insolites (bourgs, maisons, hippodromes, écoles et même dans une église).

 

Lors de certaines saisons, on ne manquait presque jamais. De janvier 1907 à octobre 1909, la meute prit 97 cerfs pour 97 attaques. De fait, l’équipage était devenu l’un des plus beaux que la vènerie française ait connu. Le territoire s’étendait sur plusieurs massifs normands : Breteuil, Évreux, Conches, Vernon, Brotonne, Senonches, etc.

 

Le marquis n’employa que deux premiers piqueurs successifs : Louis Guinot puis La Feuille. Les boutons étaient eux-mêmes des veneurs accomplis : Roger Laurent, ami intime du marquis de Chambray qui reprendra l’équipage pour l’installer à La Ferté-Vidame en 1910 ; André Bertin, qui montera un grand vautrait avec des chiens Chambray et Servant ; Albert Firmin- Didot, fondateur de l’Équipage de Chandai ; la comtesse d’Ideville qui poursuivra l’équipage de Roger Laurent avec son Rallye Navarre ; Maurice de Gasté, qui rédigea une importante monographie consacrée à l’équipage et qui réalisa de très nombreux clichés de l’ensemble des boutons, du personnel, des chiens, des territoires.

 

L’équipage n’avait pas l’exclusivité du sang Chambray. Le marquis céda certaines de ses créations à plusieurs coreligionnaires. On retrouva les magnifiques chiens à manteau blanc et orange ou des croisements chez des veneurs normands de la fin du XIXe siècle tels MM. de Pontoi-Pontcarré ou Bardin. Des souches Chambray furent aussi utilisées par le comte d’Andigné ou au Rallye Malgré-Tout dans les années 1920, par M. Beauchamp dans le Bourbonnais, et peut-être même par M. des Champs de Verneix qui chassa brièvement le cerf de Java en Nouvelle-Calédonie... Jules du Souzy avait lui repris des chiens de Roger Laurent, décédé en 1927. Huit ans plus tard, M. du Souzy perdit toute sa meute, noyée après un tragique hallali sur un étang pris par une mince couche de glace.

 

En 1944, le château de Chambray fut transformé en lycée agricole. Le grand dix-cors en bronze offert par ses boutons à M. de Chambray lors des célébrations de la prise du 1000e cerf de l’équipage se trouve toujours devant la bâtisse. Le Grand Chef repose quant à lui dans la petite chapelle du domaine depuis 1910.

 

L'équipage du marquis de Chambray - Archives de l'équipage - Société de Vènerie

 

(Gaspar Soulat - Texte tiré du supplément au numéro 236 de la revue Vènerie - Décembre 2024)

Race(s) de chiens Chambray Blanc et Orange
Chenil Château de Chambray 27120 Chambray (1850 - 1910)
CerfLièvre