Vautrait de Montrésor
(1862 - 1890)
Maître(s) d'équipage | M. Fernand Raoul-Duval (1878 - 1890) |
M. Xanier Branicki (1862 - 1877) | |
Territoire | Forêt de Loches |
Fanfare(s) | La Montrésor, La Branicki |
Historique | Le comte Branicki était Lieutenant de Louveterie. En 1873, M. Ch. Zamoiski fut associé et la tenue fut modifiée. Ami de Napoléon III, financier, Xavier Branicki mourut en Egypte en 1879, lors d’une de ses expéditions. L’équipage passa, en 1877, à M. Fernand Raoul-Duval, puis Charles Barton. M. Raoul-Duval, régent de la Banque de France, chassait souvent avec les piqueurs. Le vautrait prenait à tir et à courre 80 sangliers par saison. Vers 1900, M. René Raoul-Duval modifia beaucoup ce vautrait et M. Barton forma avec cette meute le Vautrait de Mesnes. L’appellation Vautrait de Montrésor subsiste jusqu’en 1901 dans les annuaires.
Extrait tiré de l'article « Ces chiens exceptionnels - 4e partie » publié dans la revue Vènerie de décembre 2021 (numéro 224) :
« À l’origine, cet équipage cosmopolite appartenait au comte Xavier Branicki, né en 1816. Ce dernier était un homme de ce XIXe siècle où les vies ressemblaient parfois à des intrigues de roman. Natif de Varsovie et patriote polonais, le comte Branicki avait été aide de camp de Nicolas Ier, tsar de Russie. Il avait ensuite parcouru l’Europe et sympathisé avec la famille Bonaparte. Banni de Russie pour son refus d’y servir un pouvoir hostile à l’émancipation de sa chère Pologne, Branicki acquit le château de Montrésor et les terres attenantes, entre Loches et Valençay. Assis sur une solide fortune, il monta son vautrait à Montrésor.
Le château de Montrésor - Tiré de l'ouvrage Deux Siècles de Vènerie à travers la France - H. Tremblot de la Croix et B. Tollu (1988)
Les sangliers locaux étaient moins chassés dans les règles de la vènerie que tirés par des invités prestigieux tel le prince Napoléon-Jérôme. D’un coup de fusil, ils raccourcissaient la fuite des suidés tourangeaux sous le regard satisfait du fantasque comte Branicki. Lieutenant de louveterie à partir de1862, Branicki fit venir à Montrésor deux chiens exceptionnels – du moins par leurs origines géographiques : des Brachets polonais (dits aussi Ogar Polski ou Polish Hounds). Ces chiens rustiques, aujourd'hui classés par la Centrale canine comme « chiens courants de taille moyenne » (Groupe 6, Section 1), étaient le fruit de croisements entre le Chien de Saint-Hubert et le Chien courant polonais (Gonczy Polski). À propos du Brachet polonais, Emmanuel Le Couteulx de Canteleu écrivit dans la revue Le Chenil d’août 1893 : « Chien noir et feu que je ne connaissais pas. Il paraît à l’œil, pouvoir assez bien convenir, si toutefois il a conservé les qualités de change de ces ancêtres car il descend certainement du Saint-Hubert ; mais je crains qu’il y ait en lui beaucoup de sang de briquet ; par conséquent peu de qualité pour le change. »
Quoiqu’il en fût, nos deux chiens polonais étaient semble-t-il assez performants pour que Xavier Branicki poursuive l’élevage de ses Ogar Polski et ses chasses à tir avec chiens courants. Le comte Branicki n’était pas exactement un passionné de chasse à courre à la française : âgé de 60 ans, il laissa son vautrait à René Raoul-Duval en 1877. Le nouveau maître d’équipage se tourna vers les meilleurs chenils anglais pour mettre sur pied une meute capable de forcer son animal. Il fit l’acquisition de soixante-quinze rapides Foxhounds. Ils furent associés à des chiens du Haut-Poitou, plus fins de nez.
En 1879, Xavier Branicki, quant à lui, se trouvait bien loin de ses terres de Montrésor. Il voyageait en Égypte, à Assiout, sur les rives occidentales du Nil. Il devait y mourir dans des circonstances troubles. À la tête du Vautrait de Montrésor, René Raoul-Duval s’associa à l'irlandais Charles Barton, qui s’impliquera de plus en plus dans la gestion de l’équipage. Vers 1900, on comptait dans la meute de grands chiens de sanglier servis par le piqueur Louis Chauveau : Sirus, Dagobert ou Turbulent, qui était devenu un limier de haut vol. Le courage du chien Austerlitz lors des abois valu à ce vieux grognard de la meute une vilaine blessure en 1900, 95 ans après la bataille qui lui avait donné son nom.
En 1903, M. Raoul-Duval laissa le fouet pour le sucre : il se retira du vautrait pour se consacrer pleinement à ses activités d’administrateur de la société Say (aujourd’hui Béghin-Say). Seul aux commandes, Charles Barton devint l’un des rares britanniques à rencontrer le succès en vènerie sur notre sol. Son équipage pris le nom de Vautrait de Mesnes.
Brachet polonais tel que Branicki en importa en France - Image libre de droit
C’est à ce moment-ci que les métis de loup entrèrent dans la meute de M. Barton. Il furent offerts par Marc de Pully. M. de Pully descendait d’une belle dynastie de veneurs installés dans la Vienne. Privé d’une main, il était pourtant un cavalier émérite et téméraire. Personnage étonnant, bon éleveur, il s’était rendu propriétaire de deux petits animaux étranges : un couple issu de l’union d’un loup et d’une chienne harrier. Ces métis avaient la taille d’un gros renard, les oreilles droites, la couleur et le poil d’un loup. Ils furent reproduits avec les grands Foxhounds de Charles Barton. Les chiots obtenus étaient pour une moitié semblables à des chiens de meute à oreilles tombantes, pour l’autre à des loups noir et fauve.
Satisfait de leur instinct de chasseur, M. Barton poursuivit l’expérience avec un grand loup charentais. Après deux générations, les tricolores obtenus étaient endurants et très fins de nez, en un mot : excellents. Seuls de petits yeux jaunes et perçants trahissaient les origines sauvages de ces beaux chiens d’ordre.
Avant 1914, avec M. de La Roche-Aymon comme associé, l’équipage était à son zénith. À cette époque, le meilleur chien de Charles Barton était un dénommé Messmate. De 1906 jusqu’à la guerre, il contribua à la prise de 307 sangliers. En argot militaire anglais, un « messmate » désigne le camarade avec lequel on a l’habitude de manger à la cantine. Ainsi, notre grand chien de sanglier partagea 307 fois son repas lors des curées de notre performant vautrait. Messmate, comme ses semblables, était marqué d’un numéro sur le flanc gauche pour faciliter son identification.
Résumons la situation. Le Vautrait de Montrésor devenu Vautrait de Mesnes, a donc été monté par un Polonais, auquel succédèrent un sucrier français puis un veneur irlandais. On y chassa avec des chiens polonais croisés avec la race belge de Saint-Hubert, puis des Foxhounds achetés outre-Manche, des bâtards poitevins et des métis issus d’un loup venu des Charentes. »
(Gaspar Soulat - Extrait tiré de l'article « Ces chiens exceptionnels - 4e partie » publié dans la revue Vènerie de décembre 2021 - numéro 224) |
Race(s) de chiens | Poitevin |
Anglais | |
Brachet polonais | |
Chenil | Château de Montrésor 37460 Montrésor (1862 - 1901) |
