Vautrait Normand Piqu'Avant

(1880 - 1890)

Maître(s) d'équipage M. Max Thélu (1880 - 1890)
TerritoireForêt d'Eu
Devise(s)Normand Piqu'Avant.
Fanfare(s)La Thélu
Historique

Max Thélu, maître d’équipage de ce vautrait étincelant, fut le digne successeur d’une belle dynastie de veneurs normands. Déjà sous l’Ancien Régime, son ancêtre Théodore chassait le lièvre avec des chiens artésiens et normands dans les environs de Frûges, dans le Pas-de-Calais. Théodore fut député sous le Directoire. Il chassa jusqu’à près de quatre-vingts ans et eut une mort singulière, tombant au champ d’honneur cynégétique. Ainsi, en août 1837, alors qu’il suivait à cheval sa meute qui traversait un pâturage, sa monture fut chargée par un taureau mécontent du passage de la chasse dans son périmètre. Le veneur devait mourir de sa chute quelques jours après.

 

Auguste Thélu, le père de Max, fut lui aussi un chasseur à courre émérite. En 1842, sous la Monarchie de Juillet, il fut nommé lieutenant de louveterie. Autour d’Aumale, en Seine-Maritime, il chassait le loup, le lièvre et le sanglier. Sa meute se composait de chiens anglo-normands et normands, très performants dans le courre du loup, duquel Auguste Thélu devint un grand spécialiste. On lui doit quelques écrits, en forme de traité, dans lesquels il expose son savoir sur la vènerie du grand canidé : conseils sur le choix des chiens, sur les techniques de chasse ou sur le personnel à recruter. L’efficace piqueur Charles Duparc fit d’ailleurs ses armes auprès d’Auguste Thélu avant de rejoindre le vautrait des Chézelles.

 

Tiré de l'ouvrage Un Siècle de Vènerie du comte du Passage - 1912 - Pairault (Paris) - Bnf

 

Le chenil de Max, fils d’Auguste, se trouvait à Sainte-Marguerite-les-Aumale, en Seine-Maritime. M. Thélu avait monté son équipage en association avec deux autres veneurs très investis, Messieurs Yturbe et de Mier. Le maître d’équipage porta d’abord la tenue verte des louvetiers puis, en 1883, il opta pour une tenue moins discrète : rouge à parements verts avec galons de vènerie. Durant les dix années d’existence de l’équipage, tout fut fait avec soin et un souci du détail propres à une époque où rien n’était laissé au hasard. Ainsi, tous les boutons reçurent un petit livret illustré contenant toutes les partitions et les paroles des fanfares de l’équipage pour qu’aucune fausse note n’assombrisse les belles curées de M. Thélu. Le vautrait découplait en forêt d’Eu, propriété de Philippe d’Orléans, petit-fils de Louis-Philippe, qui assistait à des chasses effectivement dignes d’un prince : « Pour être un bon veneur, dit un jour M. Thélu, il faut avoir de l’argent et en dépenser beaucoup. » Des déplacements dans l’Oise, la Somme, le Pas-de-Calais, la Belgique sont à signaler.

 

On chassa d’abord avec des anglo-saintongeois, acquis auprès de M. de Chavagnac (qui fut président du Rallie Bourbonnais) puis soixante Foxhounds apportèrent force et vitesse à la meute servie par La Verdure, La Sauce et Pierre. En 1885, un premier piqueur nommé Allard fut embauché. Aidé de deux hommes montés et de deux à pied, il fit connaître au Vautrait Normand Piqu’Avant ses plus belles années. Gardons-nous de donner trop d’importance aux statistiques mais soulignons qu’à cette époque l’équipage Thélu ne manquait quasiment jamais l’animal attaqué. Lors de la saison 1884-1885, 58 sangliers furent pris. Parfois, Max Thélu prenait un animal le matin avec la moitié des chiens, un second le midi avec l’autre moitié et un troisième l’après-midi avec tous les chiens réunis… La popularité de l’équipage fut telle que, lorsque les chasses avaient lieu dans les environs d’Amiens, près de 3 000 suiveurs pouvaient être présents en forêt. Max Thélu en vint à donner de fausses dates de rendez-vous pour ne pas être débordé par cette foule de curieux.

 

Les désistements progressifs de ses associés obligèrent le maître d’équipage à réduire considérablement le train de vie de son grand vautrait. En raison de sa proximité avec Philippe d’Orléans, soumis à l’exil en 1886, on lui retira son titre de louvetier. Désargenté, il donna les quelques chiens qu’il avait pu garder au peintre-veneur Charles de Condamy et au Vautrait Coulombel. Max Thélu s’exila finalement aux Amériques mais revint finir ses jours en Normandie. En 1912, dans une correspondance, il se décrira « désillusionné de la vie, pauvre diable oublié de presque tous »…

 

En 1883, en forêt de Boves, dans la Somme, Max Thélu avait perdu le fameux couteau de chasse légué par son père. Sur le manche d’ivoire de cette arme était gravée une scène d’hallali de sanglier. A notre connaissance, le couteau n’a jamais été retrouvé.


L’équipage Thélu ne doit pas être confondu avec le Vautrait Piqu’Avant Normand. Malgré leur parenté onomastique, ces vautraits constituent deux structures différentes. Le Piqu’Avant Normand était l’équipage de Maurice Follet, monté en 1895 et installé dans les anciens chenils des Thélu à Aumale.

 

(Gaspar Soulat - Texte tiré du supplément au numéro 218 de la revue Vènerie)

 

Autres noms usuels : Equipage Thélu, Vautrait Thélu.

Race(s) de chiens Fox Hound
Bâtard Anglo-Saintongeois
Chenil Vènerie Thélu 76390 Aumale (1880 - 1890)
Sanglier