Rallye Baudry

Vers 1905, les frères Karl et Guillaume Reille (19 et 14 ans) encouragèrent leur père, le baron Victor Reille, à acheter des Beagles pour galoper derrière les lièvres de leur propriété de Baudry. Officiellement maître d’équipage, Victor Reille ne tenait aucun rôle à la chasse. Il se contentait de suivre discrètement, pipe à la bouche. Ce sont ses deux jeunes fils, passionnés de vènerie, qui feront vivre leur équipage jusqu’à la guerre – fortement assistés par leur oncle, Pierre de La Verteville.

Le Rallye Baudry - Illustration tirée de l'ouvrage La Vénerie française contemporaine (1914) - Le Goupy (Paris)

L’histoire du Rallye Baudry est admirablement documentée. En effet, les Reille et les Verteville formaient une famille d’artistes qui gardaient des notes, des croquis, des aquarelles, inspirés de tous les laisser-courre auxquels ils prenaient part. Ainsi, Pierre de La Verteville a tenu avec minutie un livre de chasse où toutes les sorties de l’équipage sont recensées sous la forme de brefs comptes rendus. Ils seront par la suite illustrés par Karl Reille et publiés près de 90 ans plus tard.

L’équipage chassait dans les environs de Baudry, à une vingtaine de kilomètres au nord de Tours. La meute était loin d’être homogène. Les Beagles initiaux venaient de l’Équipage de La Combe, propriété de M. Bonargent-Multon, chasseur berrichon qui suivait ses chiens à cheval et sans tenue fixe. Plus tard, on ajouta des briquets aux origines disparates et multiples. Enfin, Tapageau, un griffon à la robe noire et fauve qui apparaît fréquemment sur les encres de Karl Reille consacrées à l’équipage, fut associé à la meute bigarrée du Rallye Baudry.

Pour pouvoir encadrer ce surprenant panachage canin, M. Arbeau, garde du baron Reille, fut promu valet de chiens à cheval. M. Berjat, lui aussi employé à Baudry, devint valet de chiens à pied (puis à cheval). L’équipage sonna son premier hallali durant son année de création. On parvint progressivement à la prise régulière de 20 ou 25 lièvres par saison. Vers 1912, l’équipage des Reille commença à lancer quelques chevreuils. Dans l’édition du 28 janvier 1913 du quotidien Le Gaulois, on peut lire : « Le Rallye Baudry, au baron Victor Reille, qui chasse habituellement le lièvre, vient de prendre son premier chevreuil après trois heures de chasse très intéressante. Les honneurs au baron Penin et à M. Henraux. »

Au début de la Guerre de 1914, Karl Reille fut capturé par les Allemands. Homme énergique, il remonta en 1921 un équipage pour chasser uniquement dans la voie du chevreuil, le Rallye Gaîment. La tenue, gris parements verts, était la même que celle du Rallye Baudry. En 1924, on y ajouta des galons. Reille deviendra vice-président de la Société de Vènerie et le plus important peintre et dessinateur des équipages de vènerie du XXème siècle.

(Gaspar Soulat - Texte tiré du supplément au numéro 224 de la revue Vènerie)